Décentralisation, autonomisation vis-à-vis des institutions financières, ouverture au plus grand nombre, redistribution… Sur le papier la nouvelle économie numérique a tout d’un système vertueux, voire d’une vraie alternative à une économie réelle centralisée et assujettie au capitalisme financier. Mais de récentes études scientifiques montrent que ce système reproduit pour le moment les mêmes biais.
Le marché des NFTs n’est pas ouvert au plus grand nombre
Sur le marché des NFTs, 10 % des traders actifs réalisent 85 % des transactions et concentrent 97 % des actifs numériques. Ces chiffres sont issus d’une recherche menée par un groupe de scientifiques et publiée dans la prestigieuse revue Nature. Les scientifiques ont analysé 4,7 millions de NFTs qui ont donné lieu à 6,1 millions d’échanges, principalement sur les blockchains Ethereum et WAX. Il ressort que les catégories d’échanges les plus populaires sont celles de l’art et du gaming. Mais seule une petite minorité d’investisseurs est très active pour s’échanger ces actifs numériques.
L’étude indique toutefois que le prix moyen d’un NFT dans la catégorie Art est de moins de 15 dollars dans 75 % des cas. À ce prix-là, tout le monde peut s’offrir un morceau d’abstraction encodé sur blockchain. Seuls 1 % des NFTs émis dépassent 1594 dollars.
Le marché des NFTs reproduit les privilèges et les barrières à l’entrée
La plateforme Chainalysis a analysé les pratiques de ces « 1 % » qui contrôlent le marché des NFTs. Il ressort de leur étude que ces investisseurs aguerris amassent la plus grande partie des profits parce qu’ils sont privilégiés par certains mécanismes. C’est le cas du « whitelisting », un mécanisme qui permet à un petit groupe d’acheter des NFTs nouvellement émis à un prix bien plus bas, au cours de sessions de minage. Rentrer sur une « whitelist » permet d’acheter moins cher et de revendre plus cher. C’est la garantie d’un bénéfice futur.
L’économie numérique est un désastre écologique
Comment ne pas évoquer également l’aspect écologique, qui fait de l’économie numérique une industrie extrêmement énergivore et donc désastreuse sur le plan environnemental ? On pensait naïvement que le numérique était synonyme d’immatériel, il se révèle au contraire d’une profonde matérialité. L’ingénieur et artiste Memo Atken souligne ainsi que la production d’un seul NFT consomme autant d’énergie qu’un habitant de l’UE en un mois. Ce qui représente une quantité d’émissions de CO₂ équivalente à un vol en avion de 2 heures.