« C’est une blague ! Ce n’est pas possible ! » Quand Sarah a vu la deuxième petite barre s’afficher sur son autotest, elle n’a pas voulu y croire. Pourtant, comme environ 400.000 personnes quotidiennes ces derniers jours sous l’effet de la vague Omicron, la jeune femme a bien contracté le Covid-19.
Triple contamination au Covid : un cas rare
Si les cas de réinfections se multiplient depuis le début de la pandémie, les triples contaminations, elles, sont plus rares. Sont-elles le signe d’une immunité plus faible ? Ou la marque d’une maladie qui, encore inconnue il y a plus de deux ans, est en train de devenir un virus endémique, comme la grippe saisonnière et le rhume ?
La deuxième fois, « j’ai perdu le goût et l’odorat »
Comme des millions de personnes, Sarah, professeure de français au collège, a passé le premier confinement de mars 2020 cloîtrée chez elle, avec son mari et ses deux enfants. « On avait des protocoles, tout le monde portait un masque, je donnais du gel hydroalcoolique à chaque élève et nettoyais les tables entre chaque classe, raconte Sarah. Mais dès la réouverture, on a eu des contaminations au collège, parmi les élèves comme au sein de l’équipe enseignante ». Et fin septembre, alors que démarre la deuxième vague épidémique de coronavirus, toujours avec la souche originelle de Wuhan, Sarah est testée positive pour la première fois.
Avril 2021, la France traverse sa troisième vague épidémique. La souche originelle a cédé la place au variant Alpha, venu du Royaume-Uni, qui représente près de 90 % des infections. Et qui va causer la deuxième contamination de Sarah. Le test PCR passé l’après-midi le confirme, «j’étais encore positive».
Après cinq jours de ce régime grippal, le virus se fait plus virulent. « J’ai eu cinq jours hardcore de fatigue intense, et j’ai perdu j’ai perdu le goût et l’odorat ». Quatre mois plus tard, mi-août, Sarah reçoit sa première dose de vaccin anti-Covid. « J’ai été malade pendant deux jours, comme si j’avais encore le virus, mais je me suis dit que j’étais protégée ».
Les réinfections de plus en plus nombreuses
« Les doubles contaminations ne sont pas rares, j’en vois de plus en plus à l’hôpital et je viens moi-même de contracter le Covid-19 pour la deuxième fois », confirme le Dr Benjamin Davido, infectiologue et médecin référent de crise Covid-19 à l’hôpital Raymond-Poincaré de Garches. Pourquoi ? « La littérature scientifique montre que chaque nouveau variant a un peu plus de pouvoir de neutralisation des anticorps, explique-t-il. Entre la souche de Wuhan et Alpha, il n’y avait pas de grande différence, donc le risque de réinfection était très faible, de l’ordre de 0,1 à 1 %. » Une étude de l’Imperial College de Londres estime que le risque de réinfection avec Omicron est 5,4 fois plus élevé que pour Delta, ce qui confirme que ce variant, avec ses nombreuses mutations, entraîne un échappement immunitaire.
C’est ainsi qu’il y a quelques jours, après que sa fille collégienne a été testée positive, Sarah n’a pas tardé à développer de nouveau des symptômes évocateurs. « Au départ, je n’avais rien, et mon premier test était négatif. Quelques jours après, je me suis sentie un peu fébrile, mais rien de méchant. » Un résultat confirmé par un test antigénique passé en pharmacie.
« Est-ce le signe d’une immunité pourrie ? »
« Là j’ai halluciné, confie Sarah. » « C’est vrai, chaque année j’ai au moins une angine et une sinusite », confirme Sarah. « L’immunité de muqueuses est plus ou moins forte selon les individus, ce qui rend plus sensible à l’infection, expose le Dr Davido. C’est d’ailleurs pour cette raison que des vaccins sous forme nasale sont en développement, afin de bloquer l’entrée du virus.
C’est probablement le cas de Sarah, mais elle a un système immunitaire qui répond bien face à l’agression de la maladie, puisqu’elle en développe des formes peu graves. D’ailleurs, selon les chiffres des dernières études sur Omicron, 10 % des personnes qui ont déjà eu le Covid vont être réinfectées, donc tout le monde va croiser le virus, et il faut s’attendre à un nombre important de réinfections », prévient-il.
Coronavirus : vers « une maladie endémique »
« Si je l’avais une quatrième fois, ce serait la schkoumoune ! », réagit Sarah. Mais ce scénario serait le signe « que l’on progresse tout de même vers une immunité collective, probablement en mars. Elle n’est certes pas durable et n’empêche pas les réinfections malgré la vaccination, mais la maladie va provoquer de moins en moins de formes graves, rassure l’infectiologue. Le Covid-19 est enfin en passe de devenir une maladie endémique.
Si la maladie devient endémique et aujourd’hui les conditions commencent à être réunies, les réinfections restimuleront les anticorps neutralisants, ce qui vaudra piqûre de rappel. » .