Jeudi, le Tribunal constitutionnel polonais a désavoué certains articles du traité européen, réaffirmant la primauté du droit national. Une décision qui s’inscrit sur fond de bras de fer entre Varsovie et Bruxelles. Ce vendredi, Clément Beaune, secrétaire d’Etat chargé des Affaires européennes, a déploré la situation, évoquant un risque de sortie de l’UE pour la Pologne «de facto».
La plus haute juridiction polonaise s’est prononcée jeudi contre la suprématie absolue du droit communautaire européen, une décision historique qui pourrait menacer le financement par l’Union européenne de la Pologne, voire son appartenance à l’UE. La Cour a déclaré que certains articles du traité de l’Union européenne étaient «incompatibles» avec la Constitution polonaise et a enjoint aux institutions européennes de ne pas «agir au-delà du champ de leurs compétences» en interférant avec le système judiciaire polonais, qui constitue une pomme de discorde majeure avec Bruxelles.
Clément Beaune dénonce une décision «gravissime»
«J’espère que non mais c’est gravissime, c’est un sujet éminemment politique qui s’inscrit dans une longue liste de provocations à l’égard de l’Union européenne», a commenté ce vendredi Clément Beaune, secrétaire d’Etat chargé des Affaires européennes.
Conditions ou «chantage»
Le porte-parole du gouvernement polonais, Piotr Muller, a salué l’arrêt de la Cour, soulignant qu’il confirmait «la primauté du droit constitutionnel sur les autres sources de droit». Le mois dernier, le commissaire européen chargé de l’Economie, Paolo Gentiloni, a prévenu que l’affaire judiciaire polonaise pourrait avoir des «conséquences» sur le versement des fonds de relance à la Pologne.
«La Commission européenne l’a dit. S’il n’y a pas le respect élémentaire des règles communes des droits et libertés de l’Europe, il ne peut pas y avoir de plan de soutien à la Pologne, c’est clair», a souligné Clément Beaune dans les propos recueillies par Guide entreprise.
L’Union européenne n’a pas encore approuvé les 23 milliards d’euros de subventions et les 34 milliards d’euros de prêts bon marché prévus pour ce pays.
La réforme judiciaire dans le collimateur
Le différend avec Bruxelles a porté en particulier sur un nouveau système disciplinaire pour les juges qui, selon l’UE, menace gravement l’indépendance du pouvoir judiciaire en Pologne. Mais il existe d’autres pommes de discorde, notamment la nomination des juges et leur transfert sans leur consentement entre différents tribunaux ou divisions d’un même tribunal.
«Oui, c’est une attaque contre l’Union européenne. C’est un tribunal constitutionnel fait à la main du pouvoir polonais par ailleurs. Ce gouvernement ne respecte pas des valeurs européennes fondamentales: le droit des femmes, des minorités, la justice, et souvent l’indépendance des médias», a quant à lui jugé Clément Beaune.
Un dirigeant polonais dénonce la «dictature bruxelloise»
Ce conflit a fait craindre que la Pologne ne finisse par quitter l’Union européenne, ce qui pourrait affecter la stabilité de cette communauté d’Etats. Ryszard Terlecki, le vice-président du Parlement, a récemment appelé à des «solutions drastiques» dans le conflit qui oppose la Pologne à l’UE.
«Les Britanniques ont montré que la dictature de la bureaucratie bruxelloise ne leur convenait pas. Ils ont fait demi-tour et sont partis», a-t-il déclaré.
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