Premier éditeur à lancer sa blockchain, Ubisoft va aussi être le premier à proposer des NFT sur l’un de ses jeux phares déjà existants. L’initiative reste pour l’heure assez timide, mais pose les bases d’un écosystème décentralisé dans le jeu vidéo.
Une décision murement réfléchie
Les NFT Lapins Crétins et le partenariat avec Sorare pour OneShot League n’étaient que des galops d’essai. Ubisoft a décidé de lancer cette semaine sa propre blockchain, baptisée Quartz, elle-même basée sur la blockchain Tezos. Soucieux de se positionner sur le marché des transactions décentralisées, l’éditeur français a choisi sa lucrative franchise Ghost Recon pour le lancement de ses trois premiers NFT, baptisés Digits. Deux grandes premières pour un éditeur de ce calibre. Mais il n’est pas — encore — question de gagner de l’argent en vendant des actes de propriété numériques, les skins rattachés à ces trois NFT n’étant que des DLC cosmétiques gratuits pour la version PC de Ghost Recon Breakpoint.
Pour autant, puisqu’il s’agit d’un test grandeur nature, Ubisoft s’attache à prendre toutes les précautions nécessaires dès lors que l’on parle de transactions sécurisées sur un modèle propice à la spéculation. Ne pourront acquérir cette innovation technologique des NFT que les joueurs majeurs ayant vraiment joué à Breakpoint : il sera nécessaire d’être au minimum niveau 5 pour acquérir le premier NFT, soit environ 2 h de jeu. Cela se corsera par la suite, car l’éditeur estime à 100 h le temps de jeu permettant de débloquer le second NFT, et 600 h pour le troisième.
Ubisoft : saut dans le vide
Ne cachant pas qu’il existe actuellement une bulle spéculative très forte autour du phénomène NFT, les responsables d’Ubisoft croient surtout à la force du concept de base, allant jusqu’à imaginer que des communautés de joueurs pourront peut-être un jour par ce biais investir directement dans un studio ou un projet de jeu. Le champ des possibles ouvert par le mariage de la blockchain, des cryptomonnaies et des NFT avec l’univers du jeu vidéo et son public jeune, technophile et connecté, semble d’ailleurs sans fin. Si bien que certains imaginent déjà d’innombrables monnaies in-game devenir des cryptomonnaies en dehors des écosystèmes fermés de chaque éditeur.
Si Ubisoft a choisi le réseau Tezos, c’est qu’il présente à ses yeux bien des avantages, à commencer par la possibilité d’exercer une gouvernance sur la blockchain en y opérant un nœud, d’avoir un meilleur contrôle des frais de transaction et de mieux contrôler ses besoins énergétiques. Un point sur lequel Ubisoft se veut rassurant, indiquant que le gouffre économique du bitcoin n’est pas compatible avec ses valeurs. À l’heure actuelle, Tezos demanderait un million de fois moins d’énergie que le bitcoin et une transaction représenterait 0,06 Wh .
Des réticences à lever
Reste donc à voir quelle sera l’acceptation de la communauté de joueurs vis-à-vis de l’apparition d’une composante blockchain et NFT au sein de leurs univers virtuels préférés. Si la technologie est porteuse d’espoirs et que la décentralisation est un concept très intéressant, les cryptomonnaies restent vues par beaucoup comme des bulles spéculatives malsaines. Cette opposition de fond est bien réelle et a d’ailleurs obligé la messagerie Discord à abandonner son partenariat avec la blockchain Ethereum.
Se pose d’ailleurs la question de la régulation de cet écosystème qui échappe encore bien souvent à tout cadre légal. Raison pour laquelle Quartz n’est lancé que dans neuf pays où Ubisoft a pu vérifier la réglementation en vigueur. Certains s’interrogent aussi sur l’émergence éventuelle de jeux d’argent basés sur la blockchain, à l’image des jeux qui commercialisent des «lootboxes», interdites dans certains pays comme la Belgique. Une possibilité qu’Ubisoft a préféré évincer dès le départ pour éviter toute controverse.
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