Selon l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), le nombre de logements vacants a atteint les 3,1 millions en 2023, soit une hausse de 60% depuis 1990. Cette vacance s’explique en partie par les multipropriétaires qui accumulent de plus en plus de logements.

Les multipropriétaires responsables des logements vacants ?

La chercheuse Laure Casanova Enault tente d’explorer le rôle des multipropriétaires dans la crise du logement. Selon elle, ceux-ci ont un impact sur l’accès au logement ainsi que sur la vacance des biens immobiliers en France.

Des avis qui divergent

Selon la chercheuse, l’accès aux logements abordables est freiné par l’accumulation de biens par les multipropriétaires, même si le lien avec l’augmentation du nombre de logements vacants n’est pas prouvé. « A Paris, 60% du parc privé est détenu par des personnes qui possèdent au moins cinq biens immobiliers. Ils ont plein de logements, des millions d’euros de patrimoine donc les loyers ils s’en fichent », accuse Jacques Baudrier, adjoint PCF de la mairie de Paris. Les propriétaires, quant à eux, ne sont pas d’accord sur le taux de vacance de 20% des logements dans la mairie de Paris. Sylvain Grataloup, président de l’Union nationale des propriétaires immobiliers (UNPI) assure, à partir des remontées de ses adhérents, qu’« il y a très peu de propriétaires qui laissent leur logement vacant, ou alors c’est de la vacances pour faire des travaux ».

Un lien difficile à établir

Toujours selon Laure Casanova Enault, faute d’étude scientifique sur le sujet, les liens directs entre multipropriété, augmentation de la vacance des logements et réduction du parc de résidences principales sont encore difficiles à établir. Toutefois, depuis le début des années 2 000, une dynamique d’accumulation de logements a été observée. Une accumulation « à travers une diversité d’usages, que ce soit des résidences secondaires, des locations, des biens hérités », alors que dans le même temps, le nombre de propriétaires occupants s’est stabilisé. Cela traduit un renforcement des multipropriétaires qui laisse « moins de place pour l’accession à la propriété, pour d’autres catégories de ménages, notamment les jeunes et les plus modestes qui ont reculé parmi les propriétaires occupants », explique la chercheuse.

68% des logements vacants appartiennent aux multipropriétaires

Selon l’Insee, la France compte 9,1 millions de multipropriétaires, soit un tiers des propriétaires. En 2022, ceux-ci concentrent les deux tiers du parc privé en France, soit 19,1 millions de logements. Parmi ces biens immobiliers, 2,1 millions sont vacants, soit 68% des 3,1 millions de logements vacants en France en 2022. De ces logements inoccupés, la plupart se concentre dans les zones rurales. Parmi les personnes de plus de 25ans possédant deux logements, 14,8% d’entre elles possèdent au moins un logement vacant. Ce taux monte à 53,7% chez les propriétaires de 5 à 9 logements et à 82,7% chez ceux qui en possèdent plus de 10. D’après Laure Casanova Enault, « certains multipropriétaires vont être moins intéressés par le taux de rentabilité locative, que par l’éventuelle plus-value à la revente qu’ils pourront faire de leurs biens ou par la capitalisation liée à la détention d’un bien immobilier ».