A l’approche de la Journée mondiale de lutte contre le sida, mercredi 1er décembre, les associations s’alarment de la chute du nombre de tests de dépistage du VIH et craignent un rebond épidémique à court et moyen termes.

VIH : le dépistage en net recul à cause du Covid

Les chiffres ne sont pas bons et ils font craindre le pire aux associations de lutte contre le sida. La pandémie de Covid-19 a causé une importante chute du dépistage du virus de l’immunodéficience humaine . Avec 5,2 millions de sérologies VIH réalisées en laboratoires, l’activité de dépistage, qui avait augmenté entre 2013 et 2019, a reculé de 14 % entre 2019 et 2020, révèle Santé publique France dans un communiqué, mardi 29 novembre.

« Nous sommes extrêmement inquiets, car le dépistage est un outil essentiel dans le contrôle de l’épidémie : une personne séropositive correctement traitée obtient une charge virale dite indétectable, tant elle est faible dans le sang. Concrètement, elle ne transmet plus le VIH. Cela suppose avant tout de connaître son statut sérologique».

Ce retard de dépistage signifie aussi que des personnes infectées vont découvrir leur séropositivité tardivement et être prises en charge à un stade avancé de la maladie – ce qui peut compliquer leur parcours thérapeutique et menacer leur santé.

Baisse de délivrance de la PrEP

Pour les acteurs de la lutte contre le sida, ce recul est d’autant plus rageant qu’entre 2017 et 2018, après plusieurs années de stabilité, le nombre de découvertes de séropositivité enregistrait enfin une légère baisse . « C’était peu, certes, mais les efforts réalisés en matière de dépistage, de prévention, d’accompagnement et de traitement portaient leurs fruits. Le Covid-19 a ruiné ces progrès », dit dans un soupir Florence Thune.

« Une fois encore, ce sont les populations les plus vulnérables et les plus à risques qui vont trinquer : les personnes migrantes, les travailleuses et travailleurs du sexe (pris en tant que reference sexe), les jeunes gays », pointe François Emery, chargé de plaidoyer à Act Up Paris. Selon les données de Santé publique France, les hommes ayant des rapports sexuels avec les hommes et les hétérosexuels nés à l’étranger restent les deux groupes les plus touchés. Ils représentent respectivement 43 % et 37 % des découvertes de séropositivité déclarées entre janvier 2019 et septembre 2020. « S’occuper de sa santé demande du temps et des moyens financiers. Ce sont des publics dans une situation économique et sociale très précaire pour qui cela passe après », détaille M. Emery.

Les confinements et la longue période de couvre-feu ont également empêché les associations d’aller à la rencontre de ces publics isolés. Leurs missions traditionnelles en matière de dépistage et de prévention ont par ailleurs été éclipsées par la nécessité de répondre aux besoins les plus vitaux de leurs bénéficiaires .

Autre sujet d’appréhension : la suspension des campagnes d’information et de prévention auprès des jeunes.

« On est l’autre épidémie, celle dont tout le monde se fout »

« L’attention générale s’est portée sur le Covid au détriment du sida. Ça a été très difficile de rester audible sur la question du VIH. On est l’autre épidémie : celle dont on ne parle plus et dont tout le monde se fout », résume amèrement François Emery.

Enfin, la pandémie de Covid-19 a chamboulé le monde de la recherche, y compris les travaux en cours sur le VIH. Comme tout le monde, les scientifiques ont été tenus à distance de leur laboratoire une partie de l’année. De nombreux spécialistes en épidémiologie, immunologie, virologie et infectiologie se sont ensuite lancés dans une course aux vaccins et aux traitements, quitte à délaisser momentanément d’autres projets.

Or, la recherche sur le VIH est essentielle. Quarante ans après la première alerte sur le sida, le 5 juin 1981, il n’existe toujours aucun vaccin.